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Un quart de la population mondiale vit à moins de 100 km d’une mer ou d’un océan. Aujourd’hui, toute cette population est menacée. En 20 ans, la masse glaciaire du Groenland a fortement diminué. C’est en Antarctique que le bilan est le plus catastrophique avec jusqu’à 3 fois plus de pertes. L’engrenage du réchauffement climatique pousse des villes entières à migrer pour survivre. Les îles et les zones côtières de basse altitude sont les premières concernées. Cependant, ce mouvement de personnes aura des conséquences à l’échelle planétaire.
Que nous apprennent nos experts climatiques : le rapport du GIEC ?
Le GIEC, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, a été créé en 1988. Il a pour objectif d’évaluer précisément les risques liés au dérèglement climatique. C’est une organisation neutre composée majoritairement de chercheurs et de scientifiques. Les membres constitutifs ne sont pas considérés comme des personnes physiques, mais plutôt comme les porte-paroles de leur nation. Cela n’enlève en rien à l’exhaustivité de leurs études dont le 1er rapport a été édité en 1990.
Le GIEC n’a eu de cesse que de nous alerter sur l’état d’urgence de la situation. Par manque de considération des États membres, par insuffisance de mesures satisfaisantes de nos décideurs et par nos actes déraisonnables au quotidien, le climat est irrémédiablement bouleversé. La hausse des températures et l’augmentation des gaz à effet de serre entraînent des réactions en chaîne incontrôlables. Les experts sont formels, même si nous parvenons à limiter la hausse des températures à 1,5 °C, ce qui semble actuellement assez utopiste, nous ne parviendrons pas à enrayer :
- les vagues de chaleur et les périodes de sécheresse qui se feront de plus en plus fréquentes et de plus en plus soutenues ;
- la fonte des calottes glaciaires, des glaciers de montagne et de la banquise, l’arctique a perdu 280 milliards de tonnes de glace par an entre 2006 et 2015. Sur la même période, les pertes de l’Antarctique s’élèvent à 155 milliards. Ces glaces, appelées également cryosphère, stockent près de 70 % d’eau douce. La montée des eaux pourrait atteindre plusieurs mètres, certaines villes, régions ou îles vont disparaître ;
- le dégel du pergélisol, sol gelé depuis des milliers d’années, dans lequel du méthane y est emprisonné. Si ce gaz se libère, nous assisterions selon le GIEC à un « emballement du climat » accélérant la fréquence et l’amplitude des catastrophes naturelles ;
- le réchauffement des eaux qui s’acidifient et perdent en oxygène. À cause des températures trop élevées, les récifs coralliens meurent. Ces massifs sous-marins représentent une source abondante de nourritures pour les poissons et les mollusques. Privées de cette alimentation, certaines espèces maritimes vont progressivement être réduites à néant ;
- la perturbation des courants marins avec pour conséquence une chute vertigineuse des températures hivernales en Europe. Quid du cyclone Pablo, où jamais un ouragan ne s’était formé aussi proche des côtes françaises.
Changement capital pour Jakarta
Un déménagement de grande ampleur a été décidé par le gouvernement indonésien. Victime de la montée des eaux et régulièrement inondée, l’actuelle capitale sera désertée d’ici 2050. Le niveau de pollution de cette ville y est également très élevé. Cette volonté de migrer n’est pas récente, une partie de l’île est déjà sous les eaux. Une digue avait été construite dans le but de limiter la propagation, mais s’est avérée totalement inefficace. Il aurait fallu la rehausser tous les 6 mois tant la progression est rapide. De plus, la ville s’enfonce de 5 à 10 cm par an en raison de la surquantité de sa population.
Les scientifiques annoncent qu’un tiers de l’île sera noyée en 2050. C’est donc dans ce contexte inquiétant que le gouvernement indonésien a annoncé que dès 2024, environ 10 millions de personnes quitteront leur logement. Tous devront quitter l’île de Java pour élire domicile sur l’île de Bornéo. D’une part, cette localisation est nettement moins exposée aux catastrophes naturelles (inondation, tsunami, ou même tremblement de terre). D’autre part, cela permettra également à la nouvelle capitale de bénéficier d’un positionnement plus central, dans un lieu plus boisé, riche d’une grande diversité d’espèces animales et végétales.
Mais finalement, ne déplaçons-nous pas simplement le problème ? Cet espace préservé le restera-t-il au passage de l’Homme qui colonise les lieux ? Que ferons-nous quand il n’y aura plus d’endroits où aller ? La distance est conséquente avec 1 300 km à parcourir. Le trajet promet d’être fastidieux. La mer de Java sépare les îles, le voyage prendra près de 10 ans. Le coût estimatif de l’opération est d’environ 33 milliards de dollars. Certaines données restent encore à définir comme la localisation précise du nouveau chef-lieu de l’Asie du Sud-Est et de trouver un nom pour la nouvelle capitale.
Tout autour de l’Indonésie, en Asie
Évidemment, l’Indonésie n’est pas le seul pays d’Asie à se retrouver dans une situation d’extrême urgence. Il en va de même pour les 3 grandes puissances économiques voisines : la Chine, l’Inde et le Japon. Le changement climatique en provoquant la montée des eaux va remodeler les régions côtières avec une perte inévitable de territoires.
Plusieurs points communs rassemblent ces territoires asiatiques :
- la surpopulation : la chine compte 1,39 milliard d’habitants, l’Inde en dénombre 1,33 milliard et 126,8 millions pour le Japon. Shanghai est la ville la plus peuplée du continent ;
- la pollution : deux tiers de l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre provient de l’Asie. En 2017, la Chine a émis 10,8 gigatonnes de CO2 contre 2,4 pour L’Inde. Le Japon émet chaque année plus de gaz à effet de serre que la précédente et atteint des niveaux records
- la montée des eaux aura des effets dévastateurs comme le prédit le GIEC. L’élévation du niveau de la mer pourrait atteindre 2,6 millimètres par an d’ici 30 ans. En Inde, un cinquième de la population vit aux abords des côtes.
Sur le même principe, la Malaisie, la Thaïlande et le Kazakhstan subiront le même traitement si des actions significatives de grande ampleur ne sont pas rapidement mises en place.
Simulation cartographiée de la montée des eaux
Les illustrations suivantes donnent un aperçu visuel facilement compréhensible des zones à risques d’inondations face à la montée des eaux d’ici 2070 :
L’american dream, les pieds dans l’eau
Ici, les grands titres ne manquent pas et font sensation : « Miami Beach sous les eaux », « la montée des eaux engloutira Miami et La Nouvelle-Orléans », « New York et Los Angeles noyés », etc. Les pires scénarios imaginés par nos experts du GIEC sont en train d’arriver. Pourtant, la prise de conscience est lente et ne débouche sur rien de concluant. De quoi avons-nous besoin de plus pour agir ? Des exemples, des catastrophes, elles sont déjà présentes. Leur multiplication provoquera peut-être enfin des réactions constructives et efficaces à l’échelle du monde.
Au pays de l’Oncle Sam, les prévisions ne sont pas bonnes. Les États-Unis sont particulièrement irrespectueux en termes d’environnement avec une production d’environ 5,1 gigatonnes de CO2 en 2017. La montée des eaux pourrait rehausser le niveau de la mer de 1,2 mètre d’ici à 2 100. New York pourrait subir des crues de 2,25 mètres tous les 5 ans à partir de 2030. Les villes côtières Brésiliennes sont particulièrement menacées par l’augmentation du niveau de la mer qui pourrait atteindre jusqu’à 40 cm. Les pluies diluviennes devraient s’y faire plus fréquentes. L’estimation par le « Panel brésilien sur le changement climatique », organe fondé en 2009 par le ministère des Sciences, de la Technologie et de l’Innovation et de l’Environnement, est portée à environ 1,2 milliard de dollars de pertes. Autre conséquence du réchauffement climatique, les ouragans devraient se faire plus fréquents pour au moins 6 des 22 villes côtières du pays. Les régions situées au nord et nord-est, subiront des inondations cycliques.
L’Europe a produit 3,5 gigatonnes de dioxyde de carbone en 2017. Cela représente certes moins que l’Amérique, mais nettement plus que l’Inde. Globalement, l’Union européenne présente moins de risques que le continent asiatique ou américain. Pour autant, il ne faut pas considérer qu’aucun effort n’est à fournir. En effet, le réchauffement climatique devrait générer 1,25 milliard d’euros des dégâts en Europe selon une étude réalisée par la revue « Nature Climate Change ». Dans les pays les plus menacés, on retrouve l’Angleterre où 30 000 d’habitants vivent dans des zones côtières. Les zones présagées à haut risque sont le sud du pays de Galles, le nord-ouest de l’Écosse, et enfin l’ouest et le sud de l’Angleterre.
Au Danemark, l’élévation du niveau de la mer a déjà augmenté de 15 cm en un siècle. Cette progression risque de s’accentuer dans les années à venir. Il faut dire que l’altitude la plus élevée du pays n’est que de 70 mètres au-dessus de la mer. Le réchauffement de la température de l’eau fait naître de nouvelles espèces en mer baltique comme des sardines ou des maquereaux, plutôt habituellement présentes dans les régions du sud.
L’Allemagne tente de construire des digues pour sauver tant bien que mal son île Langeoog. Situées en mer du nord allemande, 2 000 personnes y vivent. De nombreux touristes aiment s’y promener également.
Sur l’hexagone, 1 million de Français seront menacés par les inondations en 2050 avec une hausse moyenne de 1,1 mètre par an selon le GIEC. Ce chiffre peut paraître peu si on le ramène au 300 000 millions d’habitants concernés à l’échelle planétaire. Il n’en reste pas moins impressionnant à l’échelle d’un pays tel que la France. Comme nous le démontre cette étude de « Climate Central », le Pas-de-Calais pourrait disparaître totalement et les Hauts de France seront fortement impactés par cette montée des eaux.
(source : Climate central-simulation de la montée des eaux)
Les illustrations suivantes présentent les territoires dont la montée des eaux provoquera une inondation par an à partir de 2050
(source : Climate central-simulation de la montée des eaux)
(source : Climate central-simulation de la montée des eaux)
Alors comment pouvons-nous « sauver le monde » et limiter la montée des eaux ?
Malheureusement, il n’y aura pas de solutions miracles. À l’heure du constat, nous ne pouvons que limiter « la casse ». Mais il faut agir vite avec des décisions sans commune mesure. Les pays les plus consommateurs en énergies fossiles et émetteurs en CO2 tels que la Chine, les États-Unis et l’Inde devront jouer le jeu et mener des actions concrètes. Il ne faut pas se cacher derrière ces superpuissances. Nous avons également notre rôle à jouer en Europe.
Afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, il faut :
- réduire les consommations énergétiques des bâtiments résidentiels, industriels et tertiaires ;
- rendre nos industries manufacturières moins polluantes ;
- limiter les transports routiers, avions, camions, voitures ;
- éviter l’agriculture massive avec notamment la remise en cause de la monoculture et l’usage intensif d’engrais et de pesticides chimiques et l’élevage de vaches à viandes génératrices de méthane ;
- lutter contre de la déforestation, quid du dévaste de l’Amazonie, notre poumon vert, pour produire de l’huile de palme ;
- changer nos habitudes de consommations alimentaires, sans pour autant devenir forcément végan, il faudrait réduire drastiquement notre consommation de viandes et préférez manger local et de saison ;
- instaurer des normes plus restrictives pour la production de ciment et de produits chimiques ;
- former la population aux écogestes, car même si cela n’aura qu’un faible impact réel, la sensibilisation est importante pour changer les mentalités et évoluer vers un monde plus respectueux ;
- limiter nos impacts sur la pollution numérique.
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